No Guru, No Method, No Teacher
Rédigé par Rock critique / 07 octobre 1986 /
Un titre qui a le mérite de la clarté pour un album qui ne l’est pas moins (clair), une déclaration en forme de mise au point pour effacer le doute : « Ni Gourou, ni Méthode, ni Maître » (« Mais juste toi et moi et la nature, et le Père. le Fils, le Saint-Esprit », ajoute le refrain dont il est extrait). L’Irlandais visionnaire (re)vient de loin – des Them d’accord, mais aussi d’ « Astral Weeks », LE disque de 1968 – et vit semble-t-il aujourd’hui cet apaisement de soi qu’il a cherché, parfois trouvé, sur une bonne quinzaine d’albums et autant de moments forts. Une carrière mondiale (« Gloria ») traversée d’épisodes douloureux (« TB Sheets »), de clarté diffuse (« Moondance »), de sagas rageuses (« Saint–Dominic’s Preview », « Veedon Fleece »), de lyrisme mystique (« Beautiful Vision »), d’extase enfin. Avec ses déchirures (« A Sense 0f Wonder ») et ses envolées béatifiques qui servent plus que jamais de prétextes aux chansons de « No Guru, No Method, No Teacher », son disque le plus consistant (sans le moindre faux-pas?) depuis longtemps. Musicalement pourtant égal aux précédents, un puzzle d’harmonies celtes et de choeurs gospel, une enveloppe acoustique et un son qui exclut tout effet à la mode. Un puzzle inspiré, qui réchauffe et dégage une sereine sensation d’immanence quand on écoute (matin midi ou soir) les superbes ballades qui le composent, un puzzle où l’art de la demi-teinte s’écrit avec une majuscule. « No Guru… » n’agresse ni la tête ni les sens et est peut-être à prendre comme une expérience méditative de la chanson (« Oh The Warm Feeling ») répondant parfaitement à Milan Kundera quand il parle d’une musique « libératrice » qui « ouvre dans le corps des portes par où l’âme peut sortir pour fraterniser ». Et quand Van Morrison fraternise, ça ne se rate pas. Source Jean-Michel REUSSER, in Best, octobre 1986