Les héritiers

Michael Kiwanuka

D’abord, il y la flûte, puis, la pulsation jazzy et enfin ce chant débordant de sensualité. C’est bien simple, sur ce « Tell me a tale » qui ouvre l’album « Home Again » de Michael Kiwanuka, on a l’impression d’écouter un inédit d’Astral Weeks ou de Moondance.

Michael Kiwanuka est un jeune anglais de 25 ans, d’origine ougandaise dont l’émergence s’inscrit dans le retour en force de la soul dans les charts du monde entier. Souvent comparé à Otis Redding par des critiques prompts à s’enflammer, c’est donc plutôt vers la celtic soul de Van the Man que l’on lorgnera au moment de rattacher les chansons d’Home again au grand patrimoine de la musique de l’âme. Sans oublier de mettre en évidence les influences folk du jeune homme, aisément décelables dans le côté intimiste de sa musique, pas si loin finalement non plus de John Martyn, autre citoyen britannique qui mariait avec bonheur la soul et le folk. Un début de carrière sous les meilleurs auspices donc mais qui devra encore être concrétisé par l’écriture de quelques classiques intemporels. Car si l’album s’écoute avec un réel plaisir, il manque encore la(es) grande(e) chanson(s) qui installeraient définitivement Michael au côte de ses illustres influences.

Novembre 2012


Hiss Golden Messenger

« Je m’efforce de faire des albums à l’ancienne comme les maîtres du genre le faisaient ». Cette déclaration anachronique de Michael Taylor, le frontman de Hiss Golden Messenger sonne comme une déclaration d’intention pour un songwriter qui se réclame de l’influence de Bonnie Prince Billy ou de Bill Callahan (Smog). C’est pourtant, une tradition d’écriture californienne qui irait de Buffalo Springfield à Gram Parsons qui domine à l’écoute du quatrième album du groupe, « Poor Moon ». Mais, comme, notre homme, confesse également garder toujours une bible à portée de la main pour chercher l’inspiration, on ne pourra s’empêcher d’évoquer également l’influence morrissienne dans le chant habité, le côté country soul (pas moins de 16 musiciens officient sur « Poor Moon ») ou la ferveur quasi religieuse de certains titres. Si cette imprégnation religieuse ne vous fait pas fuir, je vous recommande donc l’écoute de ce disque d’un classicisme bienvenu et assumé.

Décembre 2012


Kevin Rowland (Dexy’s Midnight Runners)

Superstar du début des 80’s , Kevin Rowland a repris Van, Jackie Wilson Said. A la même époque, il faisait jouer And it Stoned me (une des plus belles chansons du monde) en ouverture de ses concerts. Il partage avec Van une origine irlandaise et une fascination pour les musiques noires américaines (plus soul que blues chez Rowland). Malheureusement, après un début de carrière tonitruant (succès mondial pour Too-Rye-ae), la suite de sa trajectoire fut beaucoup plus erratique. Il a même connu une longue éclipse de la fin des années 80 au milieu des années 90. Ce retrait coincide avec le cinglant échec commercial et critique de son chef d’oeuvre « Don’t stand me down« , pourtant un des plus grands disques de « Blue eyed soul » jamais enregistrés. Ce disque à été réédité en 1996 par le défunt label Création et il reste le plus morrisonien de toute la discographie de Rowland. Lors de sa réédition, Christophe Conte dans les inrockuptibles en parlait ainsi : « Honteusement sous-estimé, le troisième album des Dexy’s rouvrait, après Van Morrison, l’axe Dublin-Memphis…« . Il a depuis adopté une posture de crooner qui lui va moins bien et qui ne nous convaint guère : dernier album assez moyen paru en 1997. On attend dès lors de ces nouvelles en espérant un recentrage sur ses racines. On peut toujours rêver.

En juillet 2011, les Dexy’s Midnight Runners chroniquaient avec enthousiasme leur retour en studio. Le leader Kevin Rowland avait alors en tête de mettre au point le premier album studio de son célèbre groupe depuis la parution de Don’t Stand Me Down en 1985. Eh ben voilà, c’est fait. Le disque s’appelle One Day I’m Going To Soar, il paraîtra le 4 juin 2012, et le premier extrait fichtrement soyeux Nowhere Is Home est en écoute ci-dessous.

Avril 2012


Ray LaMontagne

Ray LaMontagne est né dans le New Hampshire le 18 juin 1973. Auteur/compositeur/interprète, sa musique soul/folk prête a sa voix chaude et suave des airs de campagnes américaines et de bayous. Il vit dans le Maine avec sa femme et ses 2 fils. Sa révélation musicale proviendrait de l’écoute de Stephen Stills « Tree Top Flyer » à la radio. Dès lors, il décide d’abandonner son travail dans une usine de chaussures pour se consacrer à la musique. Le résultat sera en 1999, une démo composée de 10 chansons qui attirera l’attention de Jamie Ceretta à Chrysalis Music Publishing.

Son premier album « Trouble » sorti en 2004 est produit par Ethan Johns (producteur, entre autres, de Ryan Adams ou de Rufus Wainwhrigt). Ray Lamontagne y pose un ton mélancolique, et y révèle ses talents d’écriture. L’album, pourtant bien accueilli par la critique, ne connaîtra pas un énorme succès.

Suivra « Till the Sun Turns Black » en 2006, qui bien que dans la continuité du premier, arrive avec des arrangements plus peaufiné, une musique, notamment des cordes, plus présente, tandis que les textes toujours aussi touchants mettent en valeur la voix de Ray LaMontagne. Des chansons comme « Three More Days » ou « You Can Bring Me Flowers » montrent que son style n’est pas limité à la « ballade ».

En 2008, « Gossip In The Grain » viendra nous charmer avec ses accents rétros, son « You Are The Best Thing » enjoué qui aurait pu faire partie du répertoire d’Otis Redding.

Source LastFM


Sunhouse

Un ovni. A ma connaissance, un seul album « Crasy on the weekend » paru en 1998. Une véritable réussite d’écriture, à la fois condensée, mature et précise, une gageure pour ces gamins des midlands, emmenés par le chanteur Gavin Clarke, « dont la vie se partageait jusqu’alors entre des « boulots merdiques »et le déchiffrage des tablatures de Van Morrison« . On pouvait attendre le meilleur comme le pire de la personnalité erratique de ce Gavin Clarke qui s’attirait pourtant toute notre sympathie en déclarant : « La musique à la mode ne nous touche pas, elle manque d’émotion ». Vu sur scène, le groupe délaissait le côté folk au profit d’éclairs électriques rarement présents sur le disque. Rarement, un groupe aura semblé aussi peu en phase avec son époque, puisant dans un seul style surrané, le folk-rock américain, la source de son inspiration. On n’est depuis sans nouvelles, mais on échangerait bien toute la discographie d’Oasis contre un retour en grâce de ces félés du weekend.

Mars 2002


Mike Scott (Waterboys)

L’héritier ! S’il y en avait un à garder, ce serait lui. Scott n’a pourtant pas concrétisé tous les espoirs placés en lui. Il a cependant à son actif d’avoir réalisé deux albums parfaits dont au moins un chef-d’oeuvre : « Fisherman’s blues » (1988) avec les Waterboys, un disque sous haute influence celtique sur lequel il reprend sweet thing. Un disque à la hauteur de celui de ses maîtres : Dylan et Van Morrison ! Cet album correspond pour Scott à un virage vers la musique irlandaise sous l’influence du violoniste Steve Wickham mais aussi à un dégraissage de sa musique (the big music).

Car voilà bien le défaut de notre homme, une tendance récurrente à l’emphase qui le conduit parfois à voguer dans les mêmes eaux troubles qu’un vulgaire Jim Kerr (Simple Minds). Sa carrière est pleine d’allers-retours entre rocks musclés à tendance symphoniques (très pénibles la plupart du temps) et recentrages vers un folk-rock habité où sa voix fiévreuse fait alors merveille. Mike Scott partage avec Van la quête d’un mysticisme qui irrigue toute son oeuvre. A reformé en 2000 les Waterboys pour le très ampoulé A rock in a weary land après un carrière solo inégale, cependant marquée par le magnifique bring ’em all in en 1995 qui révélait alors un talent intact. Un disque qui nous donne toutes les raisons d’y croire encore.

Allez Mike, laisse la conquête de l’Amérique à d’autres, rentre à la maison !

Février 2002


Hothouse Flowers

Après un passage malheureux à l’Eurovision 87, ils furent un court moment présentés par la presse comme la « next big thing ». Les « Hothouse flowers » n’ont pourtant rencontré qu’un succès d’estime. Et pourtant plus de vingt ans après, le choc ressenti à l’écoute de leur premier album (1988) reste une expérience unique : instrumentation acoustique mais échevelée, voix gorgée de soul, influences celtiques, des tubes potentiels à la pelle (« Don’t go », « It’ll be easier in the morning »,' »love don’t work this way »).

L’influence de Van est évidente notamment sur les titres lents. Ne croyez pas ce que vous lirez par ailleurs, cet album est énorme. Le deuxième album, en 1990 ne confirmera pas les promesses du premier. Passée la surprise de la découverte, les chansons sont moins évidentes et l’ensemble fonctionne déjà beaucoup moins bien sauf sur quelques belles ballades (« Sweet Marie », « I can see clearly now »).

Ils ont sorti un troisième (1993) puis un quatrième album (1998) qui peinent à retrouver la magie initiale du premier album. A signaler l’existence d’une excellente compilation qui fait la part belle aux « classiques » du premier album (2001;WEA). Liam O Maonlai, le chanteur du groupe, aurait un temps collaboré avec Tim Finn sans que ces travaux ne débouchent sur une quelconque production.

Février 2002


David Gray

David Gray est doué. Remarqué dès 93 sur le très dylanien « A century ends », il a depuis rencontré le succès sur le récent « White Ladder ». Comme beaucoup des héritiers potentiels, Gray est tout autant marqué par dylan que par Van. Si la musique évoque plus souvent qu’à son tour les plus belles ballades du Zim, le chant de Gray est sous obédience VanMorrisonienne. Une belle voix soul qui donne une autre tonalité au folk assez dépouillé de son auteur. On recommendera sans hésiter « White Ladder » qui est un disque très homogène mais on gagnera à jeter une oreille attentive sur ce « A century ends » initial qui contient quelques belles fulgurances soul.

Janvier 1999